Une Paroisse : Qu’est-ce que c’est ?

. La maison commune. Je reprends là une expression déjà employée par Jean-Paul II. L’Église est d’une incroyable et légitime diversité : mouvements, groupes de prières, familles spirituelles, actions multiples auprès du prochain… La paroisse, dans ce contexte pourrait être réduite à être le lieu où l’on célèbre la messe et les sacrements, et où l’on propose le caté. Vision réductrice, fonctionnaliste. La paroisse est la maison commune où cette diversité doit pouvoir se rassembler, célébrer, et enrichir l’ensemble de l’expérience de chacun, sans que chacun fasse de la paroisse une succursale de son activité à lui, une extension de sa sensibilité. La paroisse ne se réduit pas à un réseau de personnes semblables ou à une association mobilisée autour d’une action commune. Elle vit l’Église comme une réalité qui déborde toujours chacun, chaque groupe, chaque sensibilité. Le Christ ne se laisse enfermer dans aucune chapelle. Dans cette maison commune, les seules pierres qui importent vraiment sont les pierres vivantes : le rideau du temple s’est déchiré, définitivement ; c’est l’homme qui est désormais le temple vivant.

. Une communauté et pas simplement une assemblée dominicale. Ainsi que je l’ai dit dans mon premier édito, le nom propre de l’Église dans les 3 premiers siècles était : La Fraternité. Nous savons combien un des enjeux majeurs du catholicisme est de retrouver la joie (le pape ne cesse de le dire sur tous les tons) et de manifester la fraternité qui nous unit. À une époque ou Église et réalité sociale se superposaient ou presque, l’enjeu vital de la fraternité s’était estompé. Aujourd’hui, la réalité ecclésiale et la réalité sociale peuvent certes avoir des points de jonction, mais ont aussi largement pris leur autonomie l’une par rapport à l’autre. La question est donc redevenue cruciale : vivre un lieu de fraternité, de bienveillance, de joie… comme si l’on retrouvait une famille ! Un lieu qui attire, où il fait bon vivre et se retrouver, où la bienveillance n’est pas qu’un mot. Un lieu où l’on puisse sortir de la matrice consumériste qui formate nos esprits et nos comportements, pour entrer dans une vie partagée, où la gratuité, le don, demeurent des valeurs essentielles.

. La paroisse, maison commune des disciples de Jésus le Christ, Fraternité de celles et ceux qui Le reconnaissent comme le Frère aîné d’une multitude, n’a pas autre chose à « faire » que de vivre de l’Évangile pour en être témoin, comme les foules qui suivent Jésus et indiquent par là même sa présence à tous ceux qui ont besoin de Lui, tout au long des Évangiles. Comment résumer cette vie selon l’Évangile ? Je redonne une vision aujourd’hui largement partagée, que certains appellent les « 5 essentiels » :

–          Prier/célébrer. C’est le premier commandement de la Bible : « tu aimeras le Seigneur ton Dieu de toutes tes forces, de tout ton coeur, de toute ton âme ». Je sais que beaucoup aimeraient réduire le christianisme à un humanisme. Le christianisme est un humanisme intégral parce qu’il prend en compte l’aspiration de l’homme à la vie spirituelle, aussi. Il considère que l’homme déborde l’homme et appelle, suscite, laisse entrevoir la transcendance, ce qui nous déborde et nous appelle. La prière, quelque soit sa forme – groupes de louange, adoration, oraison silencieuse, contemplation ignatienne, rosaire … – ainsi que la célébration de l’eucharistie demeurent au centre de notre vie. Si l’on chasse le Christ (ce qui est plus grand que nous, qui nous déborde, nous suscite et nous ressuscite) en pensant être utile à l’homme en le plaçant au centre, alors on perd l’âme, on manifeste que l’on a rien compris à l’Incarnation.

–          Être fraternel. « Et tu aimeras ton prochain comme toi-même », telle est la seconde partie, pour Jésus, du commandement qui résume la loi et les prophètes. On pense aussi à cet autre parole de Jésus : « c’est à l’amour qu’ils se porteront les uns pour les autres que vous les reconnaîtrez comme mes disciples. » La vie fraternelle n’est pas optionnelle dans le christianisme. Et elle se vit d’abord dans la proximité du « prochain », celui qui est membre de ma communauté. Parce qu’on peut tous aimer tendrement à distance celui que l’on rencontre peu. En revanche l’épreuve de l’amour évangélique (l’agapê) se joue précisément dans la famille, le couple, la communauté : proximité et quotidienneté.

–          Être enseigné par le maître, l’écouter ! « L’homme ne vit pas seulement de pain mais de toute parole venant de la bouche du Seigneur » ! Faim de sens, d’espérance, de dignité, de profondeur, de spiritualité… les faims de l’homme sont nombreuses et ne se résument pas à notre condition matérielle. Eveil à la foi des petits, catéchèse, formations, partages d’Evangile… toutes les occasions qui permettent à l’homme de se mettre à l’écoute d’un autre pour mieux entrer en lui-même, se connaître, discerner, s’engager, approfondir le mystère de l’existence.

–          Servir ! « Le fils de l’homme n’est pas venu pour être servi mais pour servir ». Jésus ne cesse de montrer un Dieu au service de la vie des hommes, de leur dignité, de leur guérison, de leur Salut pour le dire d’un mot. « Je suis venu pour que les hommes aient la vie et qu’ils l’aient en abondance ». Comment favorisons-nous l’engagement de chacun comme serviteur : là où chacun est « planté » enraciné (sa famille, son travail, son réseau), mais aussi plus largement à travers un associatif toujours en recherche de serviteurs.

–          Evangéliser ! Ce qui donne du prix, du sens à nos vies, nous avons envie de le partager ! Ce que nous aimons nous voulons le faire connaître ! Ainsi, la dimension évangélique fait partie du dynamisme de la condition du disciple de Jésus. Il veut faire savoir, il désire faire goûter une présence, il a envie de partager une expérience qui le fait vivre. Faire connaître le Christ Jésus, sa Bonne Nouvelle (son évangile), sa manière de vivre et de regarder la vie, de chasser la peur et de vivre avec confiance, son assurance que la vie est donnée, vraiment, qu’elle est toujours appelée à renaître, à être re-suscitée !

Cette vision de la paroisse nous permettra de nous organiser en conséquence avec le conseil paroissial, le conseil aux affaires économiques et la communication. J’aurai l’occasion de le développer prochainement.